La Coupe du Monde au Qatar n’emballe pas les foules

Dès l’annonce du verdict, nombre de supporters et de spécialistes du football se sont offusqués du choix du Qatar comme pays organisateur de la Coupe du Monde, une nation sans aucune tradition footballistique ni les infrastructures nécessaires pour accueillir un tel évènement. Nous étions en 2010 et le choix du Qatar au dépend des Etats-Unis n’a pas fini de faire polémique depuis, sur de nombreux sujets variés. Mais alors que l’heure du coup d’envoi du premier match se rapproche, le 21 Novembre prochain, ces différents problèmes sont en train de s’afficher au grand jour avec une billetterie qui est pour l’instant loin de faire le plein, et le risque de voir des matches du plus grand évènement sportif de la planète se dérouler dans des stades avec des sièges vides n’a jamais été aussi grand.

Des signaux inquiétants

C’est une annonce du quotidien belge « Het Laatse Nieuws » qui a tiré la sonnette d’alarme en annonçant que, pour l’instant, seuls 1200 supporters belges avaient fait une demande de billets pour aller voir des matches de leur équipe nationale au Qatar. Lors de l’Euro 2020, ils étaient 20 000 à avoir fait une demande similaire lors de la première phase de vente de tickets, soit près de 20 fois plus.

Du côté de la France, les représentants du plus gros groupe de supporters des Bleus, les « Irrésistibles Français », ont prévenu que la plupart de leurs membres ne se rendraient pas au Qatar, et préfèreront plutôt jouer au sport sur leur PS5, alors que certains n’avaient manqué aucun match de l’équipe de France depuis près d’une décennie.

Même constat en Angleterre où les journaux ont annoncé que des centaines de tickets alloués aux supporters anglais pour les matches de l’Angleterre n’avaient toujours pas trouvé preneur, ce qui laisse craindre le pire pour les matches des équipes de plus faible renom.

Les raisons de ce désamour pour la Coupe du Monde dans le Golfe ne se trouvent toutefois pas du côté le plus médiatisé des polémiques, à savoir les conditions des travailleurs immigrés sur les chantiers des stades et le respect des droits humains et en particuliers des femmes et des homosexuels, mais bien dans le porte-monnaie des fans. En effet, les prix des tickets pour cette Coupe du Monde sont sensiblement plus élevés que lors des précédentes éditions. Ainsi, pour une place en finale, il faudra débourser pas moins de 600 euros pour la place la moins chère, soit 33% de plus qu’en Russie. Et pour les autres matches, c’est encore pire, avec une moyenne de prix 45% supérieure aux billets vendus durant la Coupe du Monde 2018.

Mauvaise organisation, mauvaise période

Mais il faut encore ajouter à cela des billets d’avion assez coûteux, et surtout des logements sur place aux prix indécents, en plus d’être peu nombreux. Le Qatar est en effet un petit pays, de seulement 2,9 millions d’habitants, et les organisateurs espèrent attirer 1,2 millions de visiteurs. S’ils ont déjà dû construire nombre de stades à toute vitesse, les dirigeants du Qatar n’ont pu construire de concert suffisamment de logements pour héberger tout le monde, et la solution émise par les organisateurs serait de loger une bonne partie du public sur des bateaux de croisière, mais il est pour l’heure impossible d’avoir aucune certitude, d’où le peu d’engouement du public européen pour se jeter sur les billets.

Malgré tout cela, bien sûr, la compétition aura bien lieu et celle-ci se révèle très incertaine, car cette absence de ferveur populaire et d’équipe jouant à domicile ayant des chances de gagner rendent difficile la possibilité de distinguer un favori. Pour l’instant, les sites de paris sportifs misent sur le Brésil, la France et l’Angleterre, mais avec des cotes tout de même élevées. Mais pourtant, malgré ce statut de favoris, les supporters français et anglais ne se ruent pas sur les tickets.

Car en plus du prix prohibitif à déverser, de nombreux autres écueils existent, et en premier lieu, la période inédite à laquelle se déroule cette Coupe du Monde. Pour la première fois de l’histoire, celle-ci aura lieu durant les mois d’hiver en Europe. Si ce calendrier ne devrait pas trop déranger les pays sud-américains, plus prompts à faire des sacrifices pour leur équipe nationale, il pose problème pour les Européens qui devront planifier des vacances en-dehors de leur période habituelle, juste avant Noël et à une période où l’argent est précieux sur fond de crise globale de l’énergie.

Une controverse après l’autre

Enfin, il y a bien sûr toutes les polémiques extra-sportives qui peuvent aussi décourager certains supporters. On peut citer le fait que Platini et Blatter soient en ce moment sous le feu des projecteurs pour de nombreux déboires judiciaires, et la certitude désormais que l’intervention de Nicolas Sarkozy, alors président de la France et lui-aussi désormais poursuivi par la justice, auprès de Platini soit la raison numéro 1 du choix final du Qatar, dixit Blatter lui-même. On peut encore parler des appels au boycott de plusieurs fédérations, notamment celles du Danemark et de la Norvège, ainsi que de nombreuses associations comme Amnesty International ayant renommé cette compétition la Coupe du Monde de la Honte. On peut enfin noter la communication désastreuse du Qatar qui a déjà prévenu que les signes d’affection dans les stades seront prohibés tout comme la présence du drapeau arc-en-ciel.Bref, entre prix exorbitants, logements incertains, choix polémique, chantiers meurtriers et droits humains bafoués, il est peu dire que les obstacles sont nombreux pour attirer les foules à cet évènement qui n’est et ne devrait être qu’une simple et belle fête du football.

Laisser un commentaire

Cliquez ici pour révoquer votre décision.